dimanche 6 septembre 2015

Le passé nous trace

Il pleut. Lui il marche. Le soleil reste loin. La pluie roule sa sonorité.
La forêt est vaste. Il est grand et souple. Des bottes noires et un imperméable gris. Il a l'age de comprendre que tout s'efface. Il a l'age de ne rien oublier, quand le temps passe, il revient dans la tête...
Le chemin caillouteux est sans boue. L'eau traverse et nettoie.
Une petite maison au détour d'une clairière pose sa carrure au milieu des arbres. L'homme a trente ans. La campagne est grande. Lui, il est en vacance, il marche vite en sportif actif. La maison est atteinte. Il prend un temps et ouvre calmement la porte. Les couleurs sont pastels, le sol est d'un vieux rouge, les murs jaune citron. Les meubles sont usés, le canapé profond comme une fatigue. La lumière du jour est d'un blanc cassé et elle va bien dans cette pièce qui respire un coin du repos. L'homme est brun, imberbe et penseur. Il quitte son imperméable et le pose sur une chaise en bois. Il sèche ses mains Et avec une douceur prudente, il ouvre un tiroir. Des papiers flottent dedans, épais et fait de dégradés de blancs soyeux et de gris frais. Les yeux cherchent lentement à retrouver quelque chose qui doit être là. L'homme sort une enveloppe qui touchait le fond du tiroir.
Elle est blanche, ordinaire, immaculée. L'homme dans la lumière naturelle va dans sa couleur. Le décor du lieu est vieillot et présent comme une éternité poussiéreuse. L'homme a une veste légère et marron et un pantalon bleu. L'homme s'assoit. L'enveloppe est ouverte. L'homme regarde la lettre qu'il vient de sortir :

Cher Jeannot
Hier la ville a été bombardée. Une catastrophe. Nous allons partir. Nous ne savons ou mais ici la mort est forte. Demain nous allons au port et un pêcheur nous fera voyager. Les bombes ont tout fait trembler. Maman n'a pas eu peur mais la maison est fendue. Nous irons loin aussi tôt que possible.
Nous t'embrassons fort
Irène et Yvan
L'homme est figé et lit et relit dans une posture hypnotique cette trace du passé. L'enveloppe est récente, la lettre conservée est jaune avec une écriture violette.
L'homme dans le silence intérieur est juste là et la porte ouverte laisse la douce pluie faire du son.
Le temps est dans le songe de l'homme.
Il prend ressource d'un passé.
Et puis avec une lenteur persistante, il range tout calmement.
Il part, marche dans la pluie, toujours vite et décidé. La pluie est fluide comme lui. Il va le cœur touché, le cœur ravivé. il va appuyé d'un passé.

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