samedi 5 décembre 2015

La nuit est longue


LA NUIT LONGUE

Métamorphose des alcools dans l'alambic des soupirs, vieillesse vive des sentiments de la lointaine planète sourde ou couve la pantomime navrée des amoureux réduits à se lutiner sous la lune rousse pour mourir neuf dans l'année finie.
L'alcool métamorphosé se réchauffe dans des amphores closes depuis un millénaire d'enterrement celtique.
Dans le bar du centre perdu "La princesse démoniaque", des serveurs grands aux allures doryphores bordent d'histoires fastidieuses des attablés décidés à ne plus bouger. Des histoires émaillées d'anecdotes vraies et bougrement lugubres.
Des festifs égarés viennent encore prendre breuvage à cette heure flottante et mélancolique ou la lumière et le calme cachent les cœurs qui courent...
Une fois dedans, la rue semble disparue pour de bon, le bar est vaste comme une salle de bals. Attente d'un sommeil dans cette ambiance de miel ouaté hors saison et sans pluie.
L'heure tourne sa manivelle mécanique dans des cerveaux à peu près brumeux.
Les néons, phares diaphane ici dans des coloris et dispositifs maniérés sont cycliques comme l'humeur traversée qui fait la pacotille des gens assis comme des sportifs en fin d'épreuves, émus comme des brouillards bleus.
Tout change comme la glace qui perd sa face quand la nuit vagabonde creuse les corps des vides du jour. L'aube vient avec une force d'une claque, le soleil dessiné qui farce la neige...
En bas du fleuve, la circulation de l'âme qui pousse les convives à voir les pertes et les alertes, brûle dans des tourbillons d'écumes, restes de la soirée enfuie, les pensées boisées, érotiques d'une bonne outrance.
Le jour venant est une trombe de pluies qui tombe sur la somnolence, la conscience maladroite, dans la forêt des sages d'abandons que constitue ce peuple fatigué des comptoirs.
Le fleuve, la vie renouvelée agite de peu la carcasse, les effluves des cuves des navrés chavirés qui bavent dans cette escale, leur cargaison en vrac dans le vague à l'âme font du confus et comme ils sont polis autant que malmenés, un silence digestif de tout ce qui ne passe pas les occupe et les leste lourdement sur un surplace.
La force est loin comme un souvenir sans appuis.

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